Une norme attendue depuis des années
En février 2020, le président du comité technique européen de normalisation du ciment, Laurent Izoret, dénonçait le blocage des normes européennes harmonisées concernant le secteur de la construction. Il expliquait alors que les ciments bas carbone étaient déjà au point depuis 2011, regrettant la lenteur imposée par la Commission européenne.
Il aura donc fallu attendre 2021 pour que les choses changent : la norme autorisant la mise sur le marché français de cette nouvelle génération de ciments, qui permettent de réduire les émissions de dioxyde de carbone de 40 à 55 %, vient de paraître.
Sans compter l’empreinte carbone imputable au transport de la matière (camions toupies, poids lourds avec attelages, etc.), la fabrication du ciment est habituellement très polluante aussi. Elle nécessite de chauffer à très haute température de l’argile et du calcaire dans des fours à énergie fossile, ce qui provoque l’émission de grandes quantités de dioxyde de carbone. Le mélange obtenu, appelé « clinker », est ensuite broyé pour devenir du ciment. La fabrication classique d’une tonne de ciment émet 860 kg de dioxyde de carbone.
Ciments ternaires et autres pistes de décarbonation
Les nouveaux ciments bas carbone, appelés ciments ternaires, sont composés de 3 ingrédients, dosés différemment selon les fabricants. Le procédé de fabrication diffère de celui du ciment classique, car le calcaire, qui contient 40 % de carbone et est responsable de 60 % des émissions de dioxyde de carbone lors de ce processus de production, n’est pas chauffé.
Les émissions de CO2 sont donc considérablement réduites, d’autant que le clinker est partiellement remplacé par un troisième ingrédient bas carbone. Il peut s’agir, par exemple, d’argiles spécifiques qui cuisent en quelques secondes seulement.
Les premiers ciments ternaires devraient désormais, grâce à la parution de cette nouvelle norme, obtenir leur certification fin 2021 et être mis sur le marché à partir de 2022.
Le dernier cimentier français indépendant, Vicat, a prévu de débuter la production de ciment ternaire à partir de 2023. Le groupe prévoit d’aller plus loin dans la décarbonation, en remplaçant l’énergie fossile des fours par la combustion de déchets. Actuellement, les déchets représentent, chez Vicat, 55 % des combustibles utilisés pour la fabrication du ciment.
Enfin, le projet Hynovi constitue une troisième piste de décarbonation du ciment. Élaboré en partenariat avec Hynamics, filiale du groupe EDF, il consiste à produire 200 000 tonnes de méthanol pour servir de carburant de synthèse.
Pour cela, il est prévu de récupérer 40 % du CO2 qui se dégage de la cimenterie de Vicat située en Isère, la plus importante, et de l’associer à de l’hydrogène bas carbone. Pour que ce projet puisse voir le jour, des financements de la France et de l’Europe sont nécessaires.
Par Pierre , le 7 décembre 2021